Loi Egalim : quel bilan un an après son entrée en vigueur ? 

Loi Egalim : quel bilan un an après son entrée en vigueur ?

Issue des Etats Généraux de l’Alimentation (EGA), la loi Egalim est entrée en vigueur début 2019 avec deux mesures phares : la hausse du seuil de revente à perte (SRP) et l’encadrement des promotions. L’objectif affiché par le gouvernement était d’enrayer la guerre des prix et de recréer de la valeur pour tous les acteurs de la chaîne alimentaire, et notamment les agriculteurs. Qu’en est-il un an après ? Quels ont été les effets de la loi en pratique ? Dans cet article, nous faisons le point sur la mise en œuvre de la loi Egalim et les conséquences pour les marques de grande consommation.

Un impact négatif sur les achats alimentaires

 

Premier constat : la loi Egalim a eu un impact négatif sur les achats alimentaires en 2019. Les PGC-FLS (Produits de grande consommation – Frais libre-service) ont enregistré leurs plus mauvais résultats de la décennie, à la fois en valeur (+ 0,8 %) et en volume (- 0,8 %). Emmanuel Fournet, Directeur Analytics Distribution chez Nielsen France, affirmait à LSA : « Il y a clairement un effet loi Egalim : 0,8 points de croissance en valeur ont été perdus sous la baisse des promotions. Cette mesure est responsable à 85 % de la chute des volumes ».

Le niveau de générosité des promotions a fortement baissé, les rendant moins attractives aux yeux des consommateurs. Selon Kantar Worldpanel, en moyenne, les foyers français ont acheté 6 articles en promo en moins au cours de l’année 2019. Les dépenses réalisées sous promotion ont diminué de 6 %. La part du chiffre d’affaires sous promo est également en baisse, atteignant 13,7 % (-1,1 points versus 2018).

2019 a aussi vu le retour de l’inflation après 7 ans de déflation des grandes marques même si elle est restée contenue. Dans ce contexte, une partie des consommateurs se sont tournés vers les enseignes EDMP (enseignes à dominante marques propres, anciennement discount). Lidl par exemple a gagné 0,4 points de part de marché.

Kantar note que la baisse du niveau de générosité des promotions a également profité aux MDD (marques de distributeur), même si leur progression après 10 années de recul est aussi liée à d’autres facteurs comme une offre nettement plus étendue en bio, en local et en produits clean label.

Des catégories fortement pénalisées

 

Les vins et spiritueux font partie des catégories les plus impactées par la loi Egalim. Alexandre Ricard, PDG du groupe Pernod Ricard, expliquait au Monde : « La loi Egalim a eu un impact sensible sur nos ventes en France de Ricard. Le relèvement du SRP s’applique aussi sur les taxes, ce qui a conduit à des hausses de prix de quasiment 9,5 %. Pour le consommateur, le seuil des 20 euros la bouteille a été franchi et les volumes de vente ont baissé ».

Le groupe Vranken-Pommery Monopole, dont les marques Heidsieck Monopole et Charles Lafitte font partie du top 10 des marques de champagne en GMS, a aussi souffert en 2019 avec des ventes en baisse de 8,6 %. Le groupe estime que ce recul est directement lié à la loi Egalim et à l’encadrement des promotions.

Le foie gras a aussi enregistré des ventes en net repli, notamment lors des fêtes de fin d’année où elles auraient baissé de 15 % selon les premières estimations. Le Comité interprofessionnel des palmipèdes à foie gras (Cifog) a tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences de la loi Egalim, clamant dans un communiqué le 15 janvier dernier : « Cette loi, initialement imaginée pour protéger la rémunération des éleveurs, aura pour conséquence en 2020 de faire baisser les revenus d’un certain nombre d’entre eux ».

Shopmium - bilan loi egalim 2

Un report de la générosité vers l’entretien et l’hygiène beauté

 

La loi Egalim ne s’applique pas aux produits non-alimentaires. Conséquence : il y a eu un report de la générosité vers le rayon Droguerie Parfumerie Hygiène (DPH). Le taux de discount moyen a ainsi fortement augmenté sur des produits comme les sacs-poubelle, les crèmes dépilatoires, les cotons et cotons-tiges, l’emballage alimentaire, le papier toilette et la lessive.

Aymeric Gueguen, Directeur Général d’A3Distrib, expliquait à LSA : « les produits d’entretien et d’hygiène beauté endossent désormais le rôle de produits d’appel avec la multiplication de leur présence en une des prospectus, mais également davantage de mises en avant dans les magasins ».

L’Association française des industries de la détergence (Afise) dénonce les conséquences de la loi Egalim. Les ventes sous promo de lessive ont progressé de 2,7 points au cours de l’année 2019 selon des données IRI. L’Afise est favorable à ce que le relèvement du seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions s’appliquent aussi au rayon DPH.

L’association affirme sur son site que le secteur subit aujourd’hui « un effet de bord de la loi Egalim ». Elle pointe du doigt la « surpression promotionnelle sur nos catégories de produits » qui « dévalorise les marques et réduit les capacités d’investissements des fournisseurs ».

Une loi qui n’a pas eu les effets escomptés

 

Face à cette situation, de nombreux acteurs s’accordent à dire que la loi Egalim n’a pas atteint ses objectifs et qu’elle a même eu un certain nombre d’effets négatifs.

Didier Duhaupand, Président du Groupement Les Mousquetaires, partageait dans une interview accordée à L’Opinion : « Il y a du bon et du mauvais. Au crédit de la loi : l’encadrement des promotions. […] Je suis, en revanche, beaucoup plus dubitatif sur le relèvement de 10 % du seuil de revente à perte sur les produits alimentaires. Cela n’a pas du tout servi à mieux rémunérer les agriculteurs, mais seulement à déplacer la pression sur les prix vers les rayons droguerie-parfumerie-hygiène (DPH) qui ne sont pas concernés. »

Le gouvernement n’est pas satisfait non plus. Il a confié à plusieurs reprises être déçu par les effets de la loi et constate qu’elle n’a pas porté ses fruits comme le souligne le magazine Linéaires. Le député Jean-Baptiste Moreau, rapporteur de la loi Egalim, a ainsi expliqué qu’il manque selon lui la toute première étape : « la contractualisation sur la base des coûts de production et l’organisation de la filière ». Le Sénat a quant lui dénoncé l’augmentation des prix pour le consommateur qui ne se retrouve pas dans les revenus des agriculteurs.

La grande distribution est régulièrement prise à partie par le gouvernement, qui estime qu’elle ne joue pas le jeu et qu’elle ne respecte pas l’esprit de la loi. La Direction générale de la Concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) aurait déjà procédé à plus de 5 500 contrôles sur l’application des nouvelles règles concernant les promotions. Elle a par ailleurs annoncé le 11 février dernier que des amendes administratives ont été infligées à Carrefour, Intermarché et Système U pour non-respect des règles lors des négociations commerciales 2019, pour un total de 4 millions d’euros.

Néanmoins, la loi Egalim a engendré certaines avancées, comme pour la filière laitière où elle a contribué à une revalorisation des prix. Selon la Fédération Nationale des Producteurs de Lait (FNPL), la loi a entrainé un retour de valeur aux producteurs de l’ordre de 11 euros / 1 000 litres. Pour la FNPL, cela reste toutefois très insuffisant. Par ailleurs, le niveau de rémunération varie fortement d’une entreprise agroalimentaire à l’autre. Malgré la loi, les pratiques restent à ce jour très hétérogènes.

Le constat est donc unanime : le premier bilan de la loi Egalim est très mitigé. Cependant, 2020 apparaît comme l’année déterminante pour juger de ses effets réels. Patrick Benezit, Secrétaire Général adjoint de la FNSEA en charge du dossier Egalim, rappelait ainsi à Plein Champ : « Les dernières ordonnances ont été prises en avril 2019, donc après les négociations commerciales qui se terminent en février. L’année 2020 va donc être l’heure de vérité ».

En conclusion, la loi Egalim représente un véritable défi pour les marques de grande consommation. En 2019, la loi a impacté à la fois les rayons alimentaires et non-alimentaires, avec des ventes en nette baisse pour certaines catégories de produits. Pour rester attractives et continuer à séduire les consommateurs, les marques devront redoubler d’efforts pour répondre à leurs attentes et s’attacher à créer des liens forts. Dans ce contexte, les mécaniques promotionnelles innovantes comme celles que nous proposons chez Shopmium sont également un excellent moyen de recruter, de fidéliser et de booster les ventes en magasin.

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